Je suis diabolique. Voilà, je l’admets.
J’avoue tout : je suis une Judas(te ?) de l’empire du bien.
J’ai rencontré des gens dont le coming out était vraiment très surprenant. Tenez, comme ce père de famille nombreuse qui à 45 ans partit avec le mari de la meilleure amie de sa femme (histoire vraie) Quand on voit des cas comme celui là, on se dit qu’il devait bien y avoir des indices, que ce monsieur n’a pas décidé de faire cela pour ennuyer sa famille mais qu’il a plutôt été porté par une sorte de nécessité dont il avait dû, forcement, ressentir des indices, des signes précurseurs.
A coté de ça avouez que mon coming out est moins surprenant.
Car, maintenant que j’y pense, nul n’est besoin de chercher très loin les premiers signes prouvant mon mauvais fond.
Elevée presque entièrement par des socialistes, l’explication éducationnelle ne peut expliquer mes dérives. J’ai donc bien une nature mauvaise, innée.
Des gens perspicaces l’auraient vu.
Si Victor Hugo m’avait connue, il aurait très probablement déclamé :
« Tout comme Napoléon perçait sous Bonaparte, l’horrible Dxdiag se voyait déjà dans BB»
(Les initiales de mon vrai nom ne pouvaient qu’hélas, inspirer la méfiance, déjà)
Dés la plus tendre enfance je commis mes premiers propos de xénophobie sélective en m’exclamant, voyant un noir dans le métro : « Mais, tata, pourquoi le monsieur n’a pas lavé l’intérieur de ses mains ? » alors qu’emmenée dans le quartier latin, découvrant mon premier restaurant « chinois » je me contentais d’un « Qu’est ce que c’est bon le riz cantonnais hein maman! »
Au CP mes premières lectures de tintin n’entraînèrent chez moi aucune indignation et je me régalais d’idées reçues qui ne me choquaient pas.
Au lycée, plusieurs signes révélaient déjà ma mal-pensance:
En cours d’histoire, je trouvais que les révolutionnaires qui avaient coupé la tête des gens étaient un peu trop vaches et pensais sans oser le dire que les aristos aussi étaient nés par hasard dans leur groupe de nantis. Et puis ça m’ennuyait beaucoup quand les gentils commençaient à s’entretuer.
En cours de Français, je trouvais ridicule les tables rondes sur « la folie » et plus encore que l’enseignante applaudisse à la remarque pourtant astucieuse d’un élève (« ouiais, si ça se trouve les vrais fous sont les gens qui sont dehors et y zenferment les gens normaux si ça se trouve euh »)
Je préférais Voltaire à Rousseau, j’étais la seule. J’aurai dû me méfier.
A la fac je commis mon premier acte d’agression véritablement raciste en empêchant un noir de doubler dans la queue du restaurant universitaire. Il m’informa sur le champ de la nature profonde et immorale que révélait ce comportement. Je n’en tint pas compte et ne menait aucune introspection.
Lors des débats sur la peine de mort, ma position fut contre cette dernière mais uniquement parce que j’ai toujours trouvé atroce l’idée d’une erreur judiciaire fatale et non pas parce que j’avais pitié des tueurs en série. Ainsi, même mes opinions bien pensantes l’étaient pour de mauvaises raisons.
Je lu Céline bien que sachant qu’il était antisémite et soutint plus volontiers Israël que les palestiniens, par pur élitisme.
Je ris en lisant Charlie hebdo mais aussi des BD de Lauzier, et ne compris même pas à l’époque pourquoi autour de moi personne ne l’appréciait.
Au lieu d’éprouver une compréhension sympathique pour les socialistes en 81 qui, alors que j’allais fêter la victoire de Mitterand au QG, arrêtèrent la voiture décorée du caducée de mon amoureux et tapèrent dessus en criant « alors le toubib, maintenant c’est nous qui tenons le manche » je m’en offusquait, méchamment.
M’efforçant d’aimer la psychanalyse en lisant tout Freud, Dolto et les autres, alors que je tombais tout à fait par hasard sur un pamphlet de Debray-Ritzen, je me dis « mais ce mec a de bons arguments !» et lorsqu’ on m’informa qu’il était d’extrême droite, je ne pus m’empêcher, malgré tout de penser qu’il avait, quand même, de très bons arguments.
Vinrent les années de maturité, travail et élevage d’enfants m’occupèrent et ma méchanceté ne couva que silencieusement, mais elle était toujours présente, latente, comme une coulée de lave tranquille. L’écoute quotidienne de radio France maintenait le volcan éteint.
Puis, alors qu’une libération très prématuré de toute activité obligatoire, m’ en laissa le temps, je m’intéressai davantage à l’actualité et au net. Or voici que la découverte de la réacosphère, fut comme une révélation : tout comme la lecture de « la scolastique freudienne » avait fait voler en éclats les certitudes dont j’avais été abreuvée pendant plusieurs décennies, la découverte de Zemour ,de Muray et des blogs de méchants, loin de m’indigner, fit sauter le bouchon du cratère, libérant le magma qui avait TOUJOURS été dessous, forcement.
Un jour je fis un commentaire, sorte d’acte manqué réussit, chez Subsubventionné
« Monsieur, vous avez fait là un article de véritable salaud et j’ai le regret d’être totalement d’accord avec vous » : c’était une amorce de prise de conscience !
Cette semaine, Didier Goux fut avec sa vidéo, comme une madeleine et un révélateur : bon sang mais c’est bien sûr : j’aimais Lauzier quand j’étais de gauche parce que j’étais déjà de droite.
J’étais un agent secret de l’empire du mal avant même d’en avoir conscience.
Et maintenant, j’avoue tout, je reconnais tout et, comme un membre d’une sorte de méchantopride, je dis aux gauchistes : je suis le monstre que vous combattez et je vous emmerde. En plus.